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LA FERMETURE DES PAYSAGES

La fermeture des paysages est un problème qui touche l’ensemble du département. Si dans certaines entités l’agriculture semble encore en « bonne santé », de nombreux secteurs de moyenne et haute montagne voient leur versants entièrement recouverts par les boisements et les fonds de vallée se referment créant un sentiment de suffocation. Si partout l’un des problèmes majeurs, immédiat ou à terme est la fermeture des paysages agricoles, les causes sont fort différentes d’un secteur à l’autre.

LE RECUL DE L’AGRICULTURE

L’une des causes de la fermeture des paysages est liée à la disparition des agriculteurs mais aussi à la modification des pratiques culturales et à la mécanisation. Les versants occupés par d’anciennes terrasses ne sont plus adaptés aux méthodes contemporaines. Cela ne concerne pas que les terres labourables, mais aussi de nombreuses terrasses à oliviers ou à fruitiers abandonnés. Si autrefois le moindre centimètre carré de terrain était cultivé, aujourd’hui, dans un souci de rentabilité, les agriculteurs préfèrent mettre à profit les terres plates, facilement accessibles et mécanisables. Ces terrasses qui structuraient fortement les paysages ne sont plus cruciales dans le contexte agricole et économique et il paraît impossible et inutile de vouloir leur rendre à toutes leur image d’antan.

Dans les secteurs où l’agriculture occupe une place marginale dans le paysage, l’impact de la fermeture est d’autant plus important. La moindre prairie, la moindre parcelle cultivée offre un espace de respiration. Le maintien de ces espaces ouverts est donc indispensable pour assurer à ces paysages une certaine qualité

De même, de nombreux secteurs d’alpages semblent en dynamique de reforestation par l’essaimage naturel de conifères et d’arbustes divers (églantiers, genévriers, genets) que les moutons refusent de brouter.
Si quelques parcelles sont surpâturées, le maintien du cheptel ovin n’a pas permis d’enrayer la dynamique d’enrésinement, du fait des changements de modes pastoraux. Seule l’intervention humaine permettrait de réouvrir ces parcours à moutons aujourd’hui refermés.

La disparition de ces grands paysages de steppes semble inquiétante d’autant plus qu’ils sont particulièrement attractifs pour le tourisme, qu’ils interviennent dans l’équilibre espaces ouverts / espaces fermés et qu’ils représentent des écosystèmes particulièrement riches.

LA FERMETURE LIEE AUX REBOISEMENTS

Le phénomène de fermeture des paysages est fortement lié aux reboisements. Ceux-ci ont commencé à la fin du XIXème siècle alors que le département connaissait son apogée en terme d’extension des paysages agricoles au détriment des paysages forestiers. Afin de lutter contre l’érosion, les services de l’Etat entreprirent de retenir les terrains par un reboisement de très grande envergure. Les services de Restauration des Terrains en Montagne organisèrent un reboisement systématique sur les sols les plus exposés, expropriant parois les agriculteurs, jusqu’à faire disparaître quelques communes entièrement (Vançon).

« Le potentiel de valorisation du 04, ce sont les grands espaces ouverts « steppiques ». C’est unique…. Sur d’autres reliefs et espaces que les grands causses…et qui demeurent au profit d’une forêt qui n’est même pas une forêt…une forêt sèche, pauvre en biodiversité, en production avec le risque d’incendie en plus… » (un technicien interviewé)

Des reboisements plus récents, sur des parcelles privées, ainsi que l’essaimage naturel des espèces plantées ou pionnières (pin noir, mélèze, pin sylvestre), ont contribué à l’extension du paysage forestier. Ces boisements, dont certains avaient pour but de retenir les sols, constituent aujourd’hui des forêts de mauvaise qualité, denses et inaccessibles.

LA RECONVERSION DE TERRAINS AGRICOLES EN BOISEMENTS

« La forêt va nous manger tout cru. D’ici 10 à 15 ans on se prendra dans la figure une masse arbustive. » (une représentante associative)

Ce type de dynamique, plus ponctuelle, touche l’ensemble du département. Ces plantations d’arbres effectuées par des particuliers présentent aussi un impact considérable. Celles-ci sont souvent la conséquence de la recherche de la rentabilité des terrains et d’apport de subventions (truffières). Parfois implantés dans les fonds de vallées, ces boisements s’ajoutent au développement de la forêt sur les versants, contribuant ainsi à renforcer la fermeture des paysages. Dans des paysages très plats et très ouverts, ceux-ci modifient les caractères propres du territoire qui font leur qualité.

LA FERMETURE AUTOUR DES VILLAGES

LA FERMETURE DES PAYSAGES

La fermeture des paysages se traduit aussi par le développement de friches autour des silhouettes remarquables, principalement sur des sites d’anciennes terrasses et les versants escarpés. Le village est alors noyé dans une masse végétale. Sa silhouette n’est presque plus perceptible. De plus, les risques d’incendie s’accroissent. Ces terrasses doivent absolument faire l’objet de campagnes de défrichement. Dans les paysages presque entièrement fermés comme dans le sud-est du département, l’extension de la végétation autour des villages est particulièrement oppressante. Par ailleurs pour les villages dont la silhouette est remarquable, il apparaît primordial d’agir pour préserver ces images d’équilibre qui attirent tant les touristes.

Un autre type de fermeture plus insidieux est en train de voir le jour. Certaines parcelles agricoles proches des extensions urbaines se retrouvent prises dans des secteurs d’habitat diffus. Celles-ci, devenues trop difficilement exploitables, sont alors abandonnées et sont peu à peu envahies par la végétation. D’autres terrains appartiennent à des non-agriculteurs ou à des citadins, et les difficultés d’entretien permettent à la végétation de s’étendre.

« les restanques et les planches, je les ai moissonnées à la main, mais on ne voit plus les murs… le maquis fait trois mètres de haut… »