Le département des Alpes de Haute-Provence présente un patrimoine bâti et naturel particulièrement riche et varié. Beaucoup de sites sont largement connus et sont d’ores et déjà préservés par des mesures légales ou réglementaires appropriées (sites classés, réserves naturelles, loi littorale, arrêté de biotope, parcs naturels…). Mais nombreux sont ceux qui sont encore méconnus ou qui, moins prestigieux, ne font l’objet d’aucune disposition protectrice.
La préservation de ces éléments passe par une prise de conscience collective et une protection réglementaire, portant également sur leurs abords. L’inscription dans le paysage, les qualités des sites forment un tout indissociable qu’il convient de préserver. Les images et le contexte dans lesquels s’inscrivent ces éléments peuvent être remis en cause par une absence de gestion de ces abords, ou par des mutations insidieuses, par exemple une urbanisation, un équipement, ou le développement incontrôlé de structures commerciales permanentes ou saisonnières captant le marché lié à l’attractivité touristique de ces sites. L’absence ou la prolifération de structures d’accueil portent également atteinte à la pérennité de ces sites.
LES SITES NATURELS REMARQUABLES
Les sites naturels remarquables sont particulièrement nombreux dans le département. Cependant, l’équilibre écologique et paysager de ces espaces naturels est mis en danger par l’augmentation de leur fréquentation, la modification de leur biotope, la multiplication de risques d’ incendie, les phénomènes d’urbanisation.
En premier lieu sont concernés tous les secteurs de haute montagne, paysages de roches et de pelouses sommitales particulièrement grandioses dont une partie est protégée par les structures des Parcs Naturels du Mercantour et du Verdon. Les sites préalpins sont touchés par la fermeture des paysages liée à la diminution du pastoralisme, qui met dangereusement en cause la pérennité de leur aspect remarquable, tandis que certains sites de montagnes sont dévalorisés par les extensions des stations de ski, ainsi que la multiplication des remontées mécaniques.
Le département recèle un grand nombre de clues et de gorges. Ces sites vertigineux sont particulièrement attractifs pour le tourisme, car souvent accessibles par la route mais sont justement menacés par ces flux touristiques difficiles à maîtriser. En période d’affluence, les problèmes de stationnement, de circulation piétonne et automobile sont quotidiens. Dans ces sites escarpés aux routes étroites, les aménagements sont complexes et doivent être particulièrement soignés afin de conserver l’aspect du site. Aussi, le moindre affichage, qu’il soit publicitaire ou d’information, prend un impact visuel important.
Le patrimoine géologique est aussi très important dans le département qui accueille la réserve géologique des Alpes de Haute-Provence. La réserve fournit déjà un travail exemplaire de mise en valeur et d’information. Il convient de la soutenir au maximum dans cette démarche et d’élargir son action, là où elle ne peut intervenir, en protégeant entre autre l’aspect visuel des nombreuses falaises et affleurements rocheux qui font partie intégrante de l’intérêt paysager du département.
LE PATRIMOINE BATI
Le bâti ancien représente un patrimoine considérable dans le département. De nombreuses constructions même modestes, témoignent d’une riche histoire, d’une occupation intense et ancienne. Or bien des travaux de restauration du bâti traditionnel apparaissent en décalage important par rapport à l’identité locale, qu’il s’agisse des matériaux, de l’organisation des bâtiments, etc.
Les villages perchés et leur socle/terrasses
De nombreux villages présentent une silhouette très intéressante dont il conviendrait de surveiller de près l’évolution. En effet une silhouette remarquable de village ne doit pas nécessairement être figée. Bien souvent, elle peut encore évoluer et conserver une belle qualité visuelle, ou être encore améliorée.
Dans le cœur de certains villages, on peut voir de nombreuses maisons en ruine. Outre le déficit en logement et la mauvaise utilisation de l’espace que représente cet état de fait, il engendre un sentiment d’abandon dont pâtit l’image de ces villages, tant vis à vis des visiteurs que des résidents. Aussi, l’aspect intérieur est parfois considérablement dévalorisé soit par manque d’entretien du bâti, soit par l’aspect négligé des espaces publics, ou encore par des actions de restauration ou d’aménagements d’espaces publics inappropriés. Ces erreurs témoignent d’une perte de culture qui touche l’ensemble de la filière de production du bâti et de l’espace urbain ainsi que de la difficulté à prendre en compte ces coûts dans les nouveaux projets.
D’autre part, les nombreuses terrasses qui entourent ces villages sont trop souvent la proie des broussailles. Les silhouettes sont ainsi noyées et parfois peu perceptibles et le risque d’incendie est ainsi augmenté. Ces terrasses qui forment un socle au village et mettent ainsi en scène leur silhouette présentent en elles-même un intérêt patrimonial important et témoignent des pratiques culturales anciennes. Parfois, la transformation en jardins familiaux apporte une solution intéressante.
Le patrimoine bâti rural et urbain
Le paysage du département est ponctué de petits monuments ruraux (oratoires, croix, chapelles, lavoirs, puits, ponts, cabanons, terrasses, canaux, bergeries, …) qui constituent un patrimoine très varié et très important. Cependant, il est souvent en mauvais état, mal mis en valeur ou laissé à l’abandon. Si ces constructions ont subi des restaurations souvent de qualité, elles ont, parfois, été mal rénovées (cas de nombreux lavoirs). Elles mériteraient une plus grande attention. Il semble nécessaire d’inventorier ce patrimoine afin de connaître les réels enjeux et de mettre en place des mesures de protection. En effet, ce petit patrimoine est encore mal connu et il n’est généralement pas protégé au titre des Monuments Historiques (ni classé, ni inscrit à l’inventaire).
De surcroît, un grand nombre de fermes anciennes isolées, parfois partiellement en ruine, présentent des caractères remarquables. Témoins du passé, de l’activité d’antan, des modes de construction… il serait domage de les laisser sombrer dans l’oubli.
LE PATRIMOINE VEGETAL
Le végétal fait partie du patrimoine au même titre que bien des constructions.
Les alignements présentent dans la plupart des cas des sujets vieillissants, dans un état sanitaire souvent mauvais et subissent des élagages trop sévères. De plus, ils comportent de très nombreux manques. Les arbres morts sont coupés mais ne sont pas remplacés. De même, à chaque élargissement ou re-calibrage de la chaussée les arbres qui disparaissent ne sont bien souvent pas renouvelés, si bien que les alignements s’effacent peu à peu. Les politiques de conservation et de replantation d’alignement restent rares (nationale n°100).
De nombreuses routes sont animées par des arbres isolés ou des groupes d’arbres qui ponctuent l’itinéraire de manière irrégulière. Bien souvent, ce sont des chênes implantés sur les talus routiers. Par leur implantation aléatoire, ces arbres accompagnent la route avec plus de souplesse qu’un alignement. Ils constituent une caractéristique intéressante des paysages routiers du département. Or, le nombre de ces arbres diminue progressivement. Alors que plusieurs générations les ont conservés, ils sont aujourd’hui couramment coupés.
Le territoire présente aussi de nombreux arbres isolés remarquables par leur âge, leur taille, leur forme, leur emplacement, leur histoire. Ils contribuent considérablement à la mise en scène et à la valorisation des paysages. Une grande variété d’essences est représentée chez ces arbres (amandiers, noyers, chênes, pins, hêtres, marronniers, tilleuls, platanes, …)
Cependant, ce patrimoine n’est pas ou peu connu et n’est que rarement protégé. Un inventaire et d’éventuelles mesures de gestion ou de protection semblent nécessaires.